Dépit





Lorsque je pensais à l'automne promis quand j'étais enfant,
je savais regarder le ciel nocturne, 
affronter le passé à la lumière qui s'était échappée depuis longtemps.

Marcher toujours dans l'ombre portée en arrière comme les grillons d'août qui se font plus bruyants.

Le goût du sel de l'après-midi, c'est ce que fait un automne : narguer avec ses fins.

Les jeux violents avaient éclaté, brûlé en éclat.
Ils s'étendaient au-delà des limites.
Ils devenaient progressivement plus longs que toute l'année.

Un son qui ressemblait à une tuerie.

Prendre le chemin vers la maison ou se pencher sur le bord de fenêtre,
qu'une seule feuille rouge apparaisse sur des branches vertes.

Je gardais les yeux levés devant moi, même si, de temps en temps,
je laissais mon regard tomber sur le tapis.

Je me suis levée lentement vers ma fenêtre,
et, me penchant à travers, je me suis endormie.

En bas, j'ai vu de petits toits rouges et noirs,
les ombres des maisons jetées d'un seul côté.

J'ai vu des boules blanches suspendues, immobiles, au-dessus des cheminées d'usine,
des réservoirs de pétrole comme des pièces de monnaie blanche.

Des hommes riaient entre les grognements de tronçonneuses,
des mâchoires métalliques de machines.

Je sentais le souffle qui murmurait la vulnérabilité des mots, la dynamique des cris taiseux.

L'eau rejette l'agression dans une quasi indifférence limpide en la noyant dans l'uniformité
et j'avais soif.

De cette beauté apaisante même quand les lèvres de l'eau gonflées de prétention écument
puis crachent violemment la haine.
Que les noirs démons reculent.

Même lorsque ses entrailles fument ou vomissent la chaleur de ses peines,
l'eau sait réconforter, en son sein maternel, les pleurs des trolls et des lutins.
Le sel des enfants.

Lorsque le courant est assez fort, on peut y noyer ses remords, laver ses regrets, sa mémoire farouche.

On peut entendre, dans les fonds sous-marins, des rires fous, des phrases touchantes
 pour éclabousser les moqueries.

A quel point est-ce devenu familier la façon dont un étranger, sans eau, peut vous achever ?

La permanence des autres.

Ce ne sont pas seulement les coquilles qui ont craqué comme si une planète tremblante
donnait des signes de sa mort progressive mais un tout qui craque.

Les coincidences sont des anti-jalons, des rappels pas toujours confortables que l'élan de vie construit
puis brise de manière imprévue.

Une première fin,
Une première déception
Qui n'est pas un souvenir
Qui vit dans le corps.
Qui est une rébellion fondée
Sur des attentes romantiques.

 

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