1 et 0

Ariana Page Russell


P n'est plus un ex puceau.
                                                                                               Son entrecuisse comme un cachot.
                                                                               Le sexe est un art forain, sur internet, ou dans sa main
Son cœur est enfoui et vieillot, l'anthropologue est un salaud.
La grotte où il s'était caché est devenu de l'immobilier.
P n'est plus un ex enfant.
P ne rêve plus gratuitement.
P a des envies et des abus.
On a trouvé l'enfant perdu.
P rêve d'animaux dans la nuit.
P aimerait que les gens s'accrochent aux arbres.
P a des fusils et des obus, il est méchant l'enfant déçu.
Son sapin deviendra une boîte, le docteur aura les mains moites.
Le cimetière est si encombré, le paradis reste caché.
Ses fées sont des poupées vénales.
La poudre qui le fait voler est prohibée sur le marché.
P n'est plus qu'un ex humain, il n'a pas de regrets, pas de chagrin.

Est-ce significatif et impératif que P aborde d'autres rencontres ?
Comment ramener P en apesanteur ?
Comment transmuter le langage de P ?

La mère de P était un pingouin rond, fatigué, aux cheveux gris.
Sa peau beige avait commencé à ressentir la gravité et le poids de son histoire dés petite.
P ressemble à un dieu d'un million de dollars mais beaucoup plus à deux centimes du paradis. 
P fredonne une chanson du grillon qui tente de s'abriter, comme l'or dans les mines non découvertes.
P n'est pas un gamin à balles perdues marchant sans expression entre les points.
P ramasse des cailloux, puis, s'agenouille, immobile, pour ne pas à avoir à respirer une ancienne icône, une sculpture ou une autre formation que la sienne.
Une foule bouche bée attend de voir la fin de P.
Du crossover le plus doux dans un enclos.
Une balle dans un revolver à nez retroussé.
La face cachée de leurs corps, débarrassés de leurs excès est cuite dans un codex.
P n'est pas né avec le visage d'un dictateur, un miracle inaperçu manquant de fond.

P boit de l'eau du robinet.
P va à la banque. 
P conduit une voiture.
P va travailler.
P sait comment attirer les économies ou les forces de travail ou celles des familles.
P avoue que P a plus de mal à tenir le tout dans un ensemble cohérent.
P réfléchit à la façon dont nous méritons tous un travail valorisant.
P cumule trois emplois.
Un seul d'entre eux inclut un contact physique.
P a l'impression qu'être beau ou belle n'a pas d'importance.
P pense qu'il y a quelque chose de bien dans le sentiment d'être perdu.
P rature des passages entiers et toxiques de son ancien disque dur même si le vrai était le vrai.
P étouffe quand il court. 
P transpire quand il se perd dans les rues même s'il aime regarder son reflet dans les vitrines.
La peau de P permet à P d'oublier sa couleur.
Le corps de P est capable de se déplacer sans être perçu comme différent.
P pense que cette intériorité est comme être à côté d'un courant-jet de sa vie.
P pense que ce ne sont pas des situations ou des sensations solitaires.
P trouve cela apaisant.
P a beaucoup de mal à imaginer autre chose que de courir sur place.
P continue à suer les mêmes gouttes qu'à son origine.
P essaie d'imaginer des structures.
P pense que P est à l'intérieur de ce que P essaie d'imaginer.
P est en pamoison.
P pense aux relations entre les gens et à la façon de traduire ce qu'ils ressentent.
P se demande si quelqu'un d'autre que lui a du mal à les visualiser.
P pense que beaucoup de gens ont déjà expliqué beaucoup de choses,
pas n'importe lesquelles, des spécifiques, des ciblées.
P essaie de ne rien divulguer des ses intentions.
P suppose qu'écrire à la première personne est plus facile, il y a tellement de dangers.
P réfléchit à la garrulité des oiseaux.
P n'a pas nécessairement conscience qu'il tente de faire tomber sa stabilité.
P aime bousculer la personne immaculée.
P n'est pas un travers mais peut comprendre les angles de traviole.
P peut concevoir un objet contradictoire dans l'argumentaire. 
P pense qu'un cercle carré n'est pas réalisable mais qu'il peut être imaginable.
P peut concevoir une modification du passé en fermant les yeux.
Il y a donc un écart quand P songe pensable et possible. 
P imagine que son histoire s'écrira en feuilles dans les veines des bébés.
Ceux qui dorment dans des berceaux taillés dans la roche.
P sait que les amours sont des fables regroupées en myriades dans sa salle de l'oubli.
P songe à sa mémoire plénière sans gloire, à cet amour non réciproque : le plus gore.
P bondit.
P réagit.
Tandis que P se soulage, sa respiration trouble son esprit.
Des symboles d'une envolée  trop haute pour les apercevoir lui viennent en tête.
P aimerait atteindre un tintement, un semblant de beauté. 
P se rappelle qu'ils avaient aimé son eau, le serpent en lui.
Tout amorphe et éphémère, comme ils s'attendaient à ce que rien ne dure de P.
Quand tout est si sauvage, il faut une minute pour que P apprécie.
                                                                                               

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