Sabina Sinko
Ne repousse pas un étranger pour son étrangeté Le temps le repousse déjà par l'humiliation et les épreuves
L'étranger n'est pas l'étranger du Cham ou du Yemen L'étranger est plutôt l'étranger de la tombe et du linceul
L'étranger a un droit pour son étrangeté Sur les résidents des villes et des demeures Son voyage est long et ses provisions ne lui permettront pas d'atteindre sa destination
Ses forces faiblissent et la mort le demande Il a encore des péchés qu'il ne connait pas Les heures de ses jours passent sans regrets, sans pleurs, ni peur, ni tristesse Il est celui qui ferme les portes en persistant
Dans les ténèbres, pas de mère ni de père tendre ni de frère qui lui tienne compagnie Garde tes excuses, toi qui l'évitais si tu savais combien tu devrais t'excuser Sa salive deviendra amère dans un râle
Ils sont venus avec un médecin pour le soigner et il ne pense pas que la médecine lui profitera aujourd'hui
Ils veulent un laveur dans la bienfaisance et les faveurs
Libre, sagace, intelligent, connaisseur et perspicace
Un homme parmi eux est venu et l'a dépouillé de ses vêtements, l'a mis à nu et l'a laissé, gisant parmi ces gens, sur le lit Leurs mains le retournaient Ils le firent s'asseoir et s'acharnèrent dans leur interrogatoire
Il avait été effrayé par ce que son œil avait vu, de l'horreur de ce qui lui arrivait, de ce qu'il allait raconter à Mounkir et à Nakir
Son fardeau est posé sur son dos et pèse sur lui Le médecin avait dévoilé son visage pour mieux le voir et les larmes coulaient de ses yeux et le noyait
En revenant, ses proches s'étaient partagés ses biens qui leur avaient été donnés sans contrepartie
Son épouse avait pris un autre époux à sa place et lui avait donné le contrôle des biens et de la maison Elle a fait de son fils un esclave afin qu'il la serve
Ne sois donc pas trompé par la vie d'ici-bas, de sa parure et regarde ce qu'elle fait à la famille et au foyer Prends ce qui te suffit et contente-toi de cela même si tu n'as pour toi que la santé Regarde celui qui veut tout dans ce bas-monde Ne le quitte-t-il pas avec son seul baume et un linceul ?
(Laysa al gharib - une poésie que j'avais traduite du médinois et réinterprétée)
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