Bestiae et Homines

Androclès, esclave romain, retirant une épine de la patte d'un lion
John Dickson batten - 1910 

Je ne peux pas faire une descente dans mon passé pour de la matière première parce que mon passé est si ennuyeux, donc je dois tout inventer.
Je me dis que ce serait bien de créer une aventure, une story.
Ma mère était issue de Larache.
Un mini sanctuaire.
J'essaie de sauver son âme qui me manque.

Belle citation du Philosophe Alain : La mort est une maladie de l'imagination.
Je n'ai jamais compris tous ces gens qui disent que mourir dans son sommeil est la plus belle des morts. Un rêve ou le cauchemar ?
Avec ton disque dur qui observe, un a un, chaque organe s'effacer, jusqu'à lui, le dernier.
Tu parles d'un kif sublimé !
Bien que, c'est peut-être l'inverse au fond : d'abord le cerveau et le reste suit, ce serait plus logique puisque notre cerveau contrôle tout notre corps et que, même, après un décès, certaines choses continuent les jours suivants à produire en rab des sécrétions, des déjections, des poils qui finissent leurs évolution et autres drôleries carnassières que j'avais pu constatées à la morgue quand le médecin légiste avait sorti le corpus glauque et verdâtre, dur comme du béton, de ma mère que j'avais lavé à coups de grand seau d'eau, avec deux femmes pro de la mort qui tue, noires de la tête au pieds,
selon un rituel adapté aux croyances de ma mère.
Trois tresses dont j'avais extrait un petite boule de cheveux, portée autour de mon cou en pendentif médaillon (le temps du deuil, trois mois si pas un an) et que j'avais brûlée un soir pour me débarrasser de son lourd souvenir.
 J'avais, ado, réalisé un acte de protection familiale, qu'elle n'avait jamais pu accomplir de son vivant (trop de peur, de soumission même de complicité).
Faute avouée ? Oui.
Une semaine, après mon anniversaire, où je l'avais invitée chez moi, elle était beaucoup trop taiseuse et distante, quelque chose de bizarre dans son attitude, quelque chose hors du commun du monde des vivants.
 Le surlendemain, j'étais allée la voir chez elle, quartier Matonge.
Elle avait ouvert et déployé toutes ses cartes sincères au possible, les yeux dans les miens,
sa voix dans mon oreille, son cœur proche du mien.
 Confession totale qui avait durée, au moins, 5 heures.
 Deux jours après, elle était décédée d'une crise cardiaque et d'une occlusion intestinale fulgurantes,
 les yeux ouverts, allongée sur son lit d'isolée totale, à 63 ans.
Nous étions en famille pour la veiller et je lui avais fermé les yeux et détendu son bras qui dépassait un peu et sa main fermée comme un coup de poing, pour que nous puissions, malgré toute l'histoire vécue, la serrer et lui témoigner un ultime salut.
Je ne suis jamais allée fleurir sa tombe sauf le jour J. Sa tombe est nue, aucune pierre.
Juste un pavé.
Il y a 15 ans, déjà, qu'elle est partie, un 11 septembre.
Elle ne sera jamais seule dans les prières.
 Elle n'a aucunement et nullement besoin de moi mais j'essaie.
Je suis sa fille qui l'avait sauvée des griffes de l'horreur.





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