Ave

Ed Ruscha

Juste un mot pour que tu m'entende pousser une plainte et un petit cri,
pour faire réagir ta belle cire.

À ce bourreau, toi, tu disais :
Mon Père
Son forfait exécrable et infect ne t'a-t-il pas mis hors de toi ?
C'est ton tourment que tu tentes d'apaiser en te courbant une nouvelle fois sous cette croix qui te pèse,
dans son dogme implacable.
Tu n'es pas tout à fait certain encore de ta foi, autrement tu ne gémirais pas.
 Tu ignores dans quel gouffre tu t'es précipité dans l'erreur.
 Nous devons rester sur le bord, attentant de nouvelles perspectives.
Soit les flammes, soit le rien, soit le néant, et faire pâlir nos fronts.
Pâleur pour pâleur, nous pâlissons.
Espoir pour espoir, nous désespérerons.
Plans, prochains crimes. 
Qui aimeraient briser en mille éclats, ce globe infortuné ?
Nous dormons peut-être la nuit au fond de l'avenir, à travers des débris sauvages,
au dessus des charniers oniriques.

Qui saluerons-nous à nos querelles respectives et brutales ? 
Ave sous des lois aveugles au sinistre pouvoir.
Enfermés dedans la toile, dans un cirque ou dans la rue au spectacle navrant.
Tout roseau que nous sommes, nous savons nous baisser sans fléchir.
C'est cet anathème que nous jetterons avant que d'expirer. 

Lorsqu'il fera rejaillir devant nos esprits avides et radins en presque tout,
des sources d'espoirs,
des clartés en masse offrant  la vision de trônes prêts à toute continuité,
nous détournerons nos yeux du Tentateur divin qui nous avait offert un jour ou un soir,
une nuit, son jus pourpre en échange de notre raison.

Lorsque nous nous promenons de monts en abîmes,
que le son de ta tessiture pénétrant en leurs fibres infirmes, intimant et frappant sur nos cœurs désolés,
tu penses que tu as perdu ton ardeur et ta fougue tant que, fébrile, tu nous sentes émus.
À bonheur, sous nos regards, lorsque tes mains déroulent tes tableaux misérables des douleurs,
l'homme n'étant plus qu'une ruine de larmes des jours d'inquiétude, nous expliquant qu'en cette terre
tout croule.
Qui se refusent à devenir chrétiens, quand de son volcan,
 son Golgotha, saignant des dessous de bras, l'auréole de ton Christ viendra à nous.
Et devant l'Eternel,
Ce sont ici nos malaises.
 Un mal incurable.
Jusqu'en nos tréfonds, nous tombons faibles.
Il ne nous reste, dans l'angoisse qui nous tient encore en vie, qu'à couvrir de baisers
cette croix que tu tiens en main. 

Pour repousser cet échange infertile, nos lèvres apprendront à dire non. Nous ne disons jamais assez non.
Non à cette croix livide dont l'ombre où faillit périr le genre humain,
qui, devant le progressisme, se dressant haut, au salvateur, a rayé la route. 
Dire non à cet instrument de supplice où nous remarquons, auprès de l'ignorant
et sous ces mêmes frappes, expirer la justice.
Dire non à notre salut s'il coûtera du sang puisque l'amour ne peut nous voler ce crime.
Tout en le caressant d'un voile charmeur, malgré le dévouement, dire non : même à la victime.
Dire non, par dessus-tout, au sacrifice qu'importe s'il est Dieu, son travail accompli est impie.

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