Ama

Jean Cocteau.


Comment ne pas trahir le monde quand on est issu du populaire ?
Comment ne pas trahir des mèches éventuelles quand on a pu allumer des têtes pensantes ?
Comment ne pas trahir la liste des choses à partager dans une gigantesque entreprise de crétinisation ?
La trahison des visions ?

Certaines choses s'alignent. Ceci n'est pas une épiphanie.
Ils veulent tous passer notre civilisation au demak'up.
Parler la langue de l'ennemi.
Rendre coup pour coup.

La normalité actuelle ressemble à l'odeur du linge frais.
Je suis attirée par elle parce que je ne l'avais jamais sentie auparavant.
Le panneau d'affichage NO ONE CARES se profile au-dessus de la rampe de sortie.
Les mains tremblantes, il tourne des feuilles bordées de tonnerre depuis la scène d'ouverture. 

Enfant clean, je ne te demande pas de m'apporter un message plein de symboles et de prudence.
La marge de la page découpée se confond avec le texte.
Le bleu, plus hagard que l'écume, qu'une hallucination, se veut blanc écarlate.
Je suis pour proclamer : tous perdus.

 Ne le tourmentez pas d'avoir entendu, dans un songe, une grenade balancée
 contre le feu muet de la salicorne de midi. 
Vivement qu'il aille à l'armée, recalé ensuite pour des raisons de faible santé mentale.
Emmenez momentanément ce corps à l'étage et repliez-le.
Polissez les vitres de ses yeux.
Eveillez chacun de ses sens, à tour de rôle.
Une bouffée délirante et il deviendra violet.
Ensuite, il commencera peut-être à donner des coups de pieds dans son berceau. 

Je repense à l'histoire de cette quinqua qui buvait beaucoup trop
et qui s'était jurée que jamais plus un mec ne lui mettrait la misère.

Où est ton mari Alice ? 
Une salle de bal vide de toute présence sauf fantomatique.
Elle avait assassiné ses vices les moins défendables,
Les avait empilé comme des corps. 

De temps en temps, elle profite d'un petit moonwalk, d'un petit écart.
Amour, garde ton œil pelé. 
Cette chose va bien à sa place et cette chose est d'orner une vie, de la nourrir.

Vous voyez ce tambour d'argent latéral ?
C'est le sommeil, n'est-ce pas ?
Caviardez caviardez, effacez, rayez, déchirez,
Laisser le vent l'emporter et il en fera des braises. 

Tant de bras croisés sur la poitrine en répétition parfaite
pour le film à succès qui pourrait échanger notre monde contre un autre.
Croire aux légendes urbaines comme si ces éléments de l'intrigue n'étaient pas des plus périmés.
Un brochet maillé dans un tissage serpentin sépare un groupe de mauvaises herbes,
espionne un autre habitant benthique, un crustacé en mue. 

Le sifflement est le soupir d'un réservoir de propane. 
Etoile d'un cauchemar gnathique doté d'un museau étroit et d'une mâchoire inférieure saillante,
de dents en ciseaux et de joues écaillées. 
Puff puff Pass.

Comment ne pas blesser la place de la femme gelée, la littérature plate,
une écriture au couteau ? 
Avoir eu des parents analphabètes, pire que d'avoir eu des mentors dyslexiques
 qui n'avaient pas fait dans la dentelle.
Des filles qui avaient été élevées pour reproduire ce que leurs pères avaient fait avant elles.
Elles ne veulent pas l'avouer, lourde admiration, déni pour certaines.
Gazouiller avec des nouvelles proies en lambeaux, de vieilles feuilles, de vieux os creux, des branches.
Des garçons qui attendent des baisers blancs, la pluie de plumes, les nuages sauvant leur plus tard.
Séparer la chair de la rivière pour opérer.

Comment ne pas se tromper de camp ?
Le bail des étoiles sur le ciel expire, respire des loisirs de moineaux, de troglodytes,
 des trottoirs mouillés.

Ecraser sous les pieds le spectre qui dit : ne t'arrête pas là. 
Une lumière tachée d'un manque d'attention.
Il n'y a jamais assez de monde pour toi. 
Ce grincement de dents est une récompense.



 

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